Affaire Alexia Daval, un avocat peut-il défendre l'indéfendable ?
Comment un avocat peut-il défendre ce que l'opinion publique considère comme indéfendable ?
Depuis les aveux de Jonathann Daval, l'époux d'Alexia, dont le corps avait été découvert il y a trois mois, l'opinion publique s'embrase face aux propos de Maître Randall Schwerdorffer, l'avocat du mari.
Longtemps convaincu de l'innocence de son client, Maître Schwerdorffer a notamment déclaré, après que son client soit passé aux aveux reconnaissant sa responsabilité dans la mort d'Alexia, que « dans cette affaire, il y avait deux victimes » ou encore que « dans cette histoire, il y avait un conjoint violent, mais pas celui auquel on pense. »
Ces propos ont fait bondir proches de la victime et personnalités politiques, criant à l'injustice et au « victim-blaming », un terme utilisé pour définir une potentielle responsabilité d'une victime dans ce qui lui arrive.
Pourtant, à ce stade, il convient à toutes les parties d'être extrêmement prudentes quant à leurs propos sur l'affaire Alexia Daval, qui n'en est qu'à ses débuts, au risque d'influencer la procédure en cours.
Petit rappel des règles déontologiques de la profession d'avocat :
Si les propos de Maître Schwerdorffer ont pu être interprétés comme une minimisation des faits, voire comme une forme de justification de la violence ayant entraîné le décès d'Alexia, il n'en demeure pas moins que l'avocat de la défense n'a fait que respecter son code de déontologie.
Pour rappel, un avocat, lorsqu'il prête serment, promet d'exercer sa fonction avec dignité, indépendance, probité, conscience et humanité. Si le désistement de représentation est possible, il est en revanche difficilement compatible avec ces règles.
Dans cette affaire, l'avocat de la Défense reconnaît lui-même une maladresse de communication lorsqu'il a, un temps, évoqué un « accident ». Mais un avocat n'est pas nécessairement un maître dans la communication, il doit avant tout être convaincu de l'innocence (ou non) de son client, et tout mettre en œuvre pour que ce dernier ait droit à une justice équitable.
La prise de position pour l'une ou l'autre des versions n'exclut en rien le droit à l'équité, au risque de transformer la justice en vaste vindicte populaire, pour reprendre les propos d'un éminent avocat pénaliste.
La minimisation ou l'interprétation des faits ne risque-t-elle pas de mettre à mal les droits des femmes ?
Les dernières informations sur cette affaire précisent qu'Alexia, la jeune femme ayant été tuée, aurait eu un comportement particulièrement blessant, et rabaissant à l'encontre de son mari Jonathann.
Les médias qui relayent en boucle ces informations ne se rendent pas compte des dégâts qu'ils peuvent faire dans l'opinion publique. La violence conjugale est condamnable, quelle que soit la forme qu'elle prend. En attendant que la lumière soit faite sur ces arguments, il ne faut jamais oublier qu'aucun comportement ne justifie une fin aussi tragique.
En moyenne une femme meurt des violences de son compagnon tous les trois jours en France, sans que cela ne fasse les gros titres des journaux. Face aux propos phallocrates tels que « elle l'avait cherché », ou encore « il faut se méfier de ce que peut raconter une femme », espérons que la mentalité évoluera plus rapidement vers l'égalité que toute femme mérite.
Crédit Image : SEBASTIEN BOZON / AFP